Pourquoi les exercices de Kegel ne sont pas réservés aux femmes
Quand on parle d’exercices de Kegel, la majorité des sportifs — surtout les hommes — font une moue perplexe, voire esquissent un sourire gêné. Pourtant, ces exercices de renforcement du plancher pelvien sont tout sauf anecdotiques dans la sphère sportive. À vrai dire, leur impact sur la santé globale, la performance athlétique et la prévention des blessures peut être plus important que nombre de programmes de gainage ou d’étirements mal exécutés.
Conçus à l’origine par le Dr Arnold Kegel dans les années 1940 pour aider les femmes à mieux contrôler leur périnée après un accouchement, les exercices de Kegel ont depuis fait leur chemin vers l’univers du sport. Aujourd’hui, ils trouvent leur place aussi bien dans la rééducation que dans l’optimisation de la performance. Et ce, chez les hommes comme chez les femmes.
Mais alors, comment les intégrer efficacement dans une routine sportive ? Et quels bénéfices concrets peuvent-ils apporter à un cycliste, un tennisman ou un crossfiteur ? C’est ce que nous allons décrypter ici, sans tabou et avec rigueur.
Comprendre le rôle du plancher pelvien chez le sportif
Le plancher pelvien, c’est cet ensemble musculaire discret qui s’étend du pubis au coccyx. Il soutient les organes abdominaux, participe à la stabilité du tronc, et joue un rôle clé dans la gestion des pressions intra-abdominales.
Un plancher pelvien tonique permet de :
- Maintenir une bonne posture lors des efforts physiques intenses
- Limiter les fuites urinaires induites par l’impact (ex : saut, sprint)
- Optimiser le transfert de force entre le haut et le bas du corps
- Favoriser un meilleur contrôle du tronc et de la respiration
Autrement dit, ignorer ce groupe musculaire revient à construire une maison sans fondations solides. Cela exposerait n’importe quel athlète, du coureur du dimanche au pratiquant de sports de raquette, à des déséquilibres, des compensations posturales… et avec le temps, à des blessures évitables.
Quels sportifs peuvent bénéficier des exercices de Kegel ?
Clairement : tous. Mais certains profils sont particulièrement concernés :
- Les coureurs : L’impact répétitif du pied sur le sol impose une forte pression sur le plancher pelvien. Des muscles faibles à ce niveau peuvent entraîner des fuites urinaires d’effort, en particulier chez les femmes — mais aussi chez les hommes après certains traitements médicaux.
- Les pratiquants de sports explosifs (haltérophilie, crossfit, tennis) : Le gainage dynamique est essentiel, et cela commence par une activation profonde — plancher pelvien inclus.
- Les cyclistes : La position assise prolongée peut comprimer le périnée. Des muscles toniques contribuent à une meilleure vascularisation et un confort accru.
- Les sportifs en post-blessure ou rééducation : Après une opération abdominale, une lombalgie chronique ou une descente d’organes, muscler le plancher pelvien fait partie d’une récupération complète.
Comment localiser correctement les muscles du plancher pelvien ?
Faire un Kegel ne revient pas à contracter n’importe quel muscle du tronc. Beaucoup activent par erreur les abdominaux, les fessiers ou les adducteurs. Le geste de base est simple — mais nécessite de l’attention.
Voici comment le localiser :
- Lors de la miction, essayez de couper le jet d’urine en pleine action. Le muscle que vous contractez à ce moment précis est votre plancher pelvien.
- Autre méthode : imaginez que vous essayez de retenir un gaz ou d’éviter de faire pipi. Cette contraction “vers l’intérieur et vers le haut” mobilise les bons muscles.
Attention, ces tests sont des repères ponctuels. Il ne faut pas les répéter régulièrement au risque d’interférer avec le bon fonctionnement urinaire.
Exemples d’exercices de Kegel utilisables dans une routine sportive
Il existe plusieurs niveaux d’exercices. Comme pour tout développement musculaire, il s’agit de progresser avec méthode. Voici une progression de base accessible à tous.
1. Contractions de base (statique)
Cible : localisation et activation du muscle.
- Position : allongé sur le dos, genoux fléchis, pieds à plat au sol.
- Action : Contractez le plancher pelvien pendant 5 secondes, puis relâchez 5 secondes.
- Séries : 10 répétitions, 3 fois par jour.
2. Contractions rapides (dynamique)
Cible : coordination et rapidité d’activation.
- Action : Contractez rapidement pendant 1 seconde, puis relâchez aussitôt.
- Séries : 20 répétitions, 2 à 3 fois par jour.
3. Intégration en position fonctionnelle (debout, en mouvement)
Objectif : transférer la contraction lors d’un effort physique réel.
- Position : debout ou en position de squat.
- Action : Contractez le plancher pelvien avant de lever une charge, de sauter ou de faire un effort intense.
- À intégrer : durant vos séances de musculation, de gainage ou de pratique sportive habituelle.
Comment intégrer les Kegels dans votre routine sans y passer des heures ?
La clé, c’est la régularité. Pas besoin d’y consacrer 30 minutes quotidiennes. Quelques minutes par jour suffisent pour ressentir des bénéfices après 4 à 6 semaines — à condition d’être rigoureux.
Suggestions d’intégration :
- Ajoutez 1 minute de contractions lors de l’échauffement ou des étirements post-entraînement.
- Profitez du trajet en voiture, du temps devant la télé ou des pauses au bureau • personne ne remarquera.
- Associez ces contractions à votre travail de gainage : ponts, planche abdominale, planche latérale.
Comme l’élastique dans un élastique de résistance, c’est discret mais essentiel.
Erreurs fréquentes à éviter
Comme dans tout entraînement musculaire, il existe des pièges classiques. Voici les plus courants :
- Contracter les mauvais muscles : Si vous sentez vos fessiers, vos quadriceps ou vos abdos se contracter puissamment, vous êtes probablement à côté de la plaque.
- En faire trop : Trop d’exercices de Kegel mal réalisés peuvent entraîner des tensions pelviennes voire des douleurs. Le muscle a aussi besoin de phases de repos.
- Oublier le relâchement : Le relâchement est aussi important que la contraction. Un muscle constamment contracté perd en élasticité et en réponse réflexe.
Kegels et performance : quelles améliorations attendre ?
Au fil des semaines, les athlètes qui intègrent les exercices de Kegel dans leur routine constatent plusieurs bénéfices mesurables :
- Stabilité accrue sur les mouvements de sprint, saut et coups explosifs
- Moins de douleurs post-lombaires ou pelviennes lors d’efforts longs
- Réduction des fuites urinaires chez les sportifs de haut niveau (fenêtre souvent taboue mais bien réelle)
- Optimisation du gainage profond en synergie avec le transverse de l’abdomen
En musculation, un bon réflexe consiste à activer le plancher pelvien en même temps que le transverse avant de prendre une charge. Résultat : un tronc plus stable, des risques réduits de blessures au dos, et une force mieux transmise.
En résumé
Les exercices de Kegel ne sont ni anodins ni réservés à un public post-partum. Ils s’intègrent parfaitement dans une logique de performance sportive, de prévention des blessures et d’optimisation du gainage profond. Leur avantage ? Ils sont simples, discrets et ne nécessitent aucun matériel.
Intégrés intelligemment dans une routine, les Kegels font la différence. Pas besoin d’être un yogi ou un kiné pour prendre conscience de leur importance. Il suffit de s’y mettre, avec méthode et patience. Parce qu’en sport, ce sont parfois les détails invisibles qui font la plus grande différence sur le terrain.